SLA : Stade de survie prolongée

19-07-2018

Benjamin Rix Brooks

Après près d’un quart de siècle, le chercheur Ton Fang et ses collègues ont fourni une explication au mystère concernant le moment exact de l’influence bénéfique du Riluzole dans le traitement des patients atteints de sclérose latérale amyotrophique (SLA). La chercheuse Heidi Seibold et ses collègues avaient déjà identifié auparavant un effet plus important du traitement par Riluzole chez les patients SLA avec une capacité vitale amoindrie. Leur étude avait été effectuée, selon une méthode basée sur l’algorithme décisionnel dit ‘de forêts aléatoires’, sur la base de données ‘Pro-ACT’, qui offre libre accès à des données concernant les essais cliniques SLA. En utilisant le système de suivi SLA du King’s College de Londres, Fang et ses collègues ont trouvé que, selon leur analyse, un patient SLA sur six participant à l’essai clinique sur la posologie initiale du Riluzole, se trouvait au stade 4 de la SLA au moment de son inscription.

Environ la moitié des patients qui se présentent à une première consultation dans les cliniques multidisciplinaires SLA en sont déjà au stade 4 de la maladie. Dans une étude d’observation clinique, nous avons signalé que la survie était prolongée chez les patients traités par Riluzole (log-rank p = 0·019), d’une moyenne de 14,6 mois (médiane 13·0, CI à 95 % 9·8 – 19·6) après le début de la ventilation non invasive (VNI) par rapport aux patients SLA avec une pression inspiratoire maximale inférieure à −60 cm H20 non traités par Riluzole (n = 18), à une moyenne de 22·3 mois (médiane 25·0, IC à 95 % 18,5 – 26.1) chez les patients SLA sous Riluzole (n = 47). Nos résultats identifient donc la possible survie augmentée chez les patients SLA qui sont déjà sous VNI, mais à basse pression inspiratoire maximale (< – 60 cm H20), lorsqu’ils sont traités par Riluzole, tout en attirant l’attention sur la complexité de la suite de la maladie.

Tout d’abord, nous devons nous demander si la pression inspiratoire maximale et la capacité vitale doivent être surveillées, car les changements dans la pression inspiratoire maximale pourraient ne pas être corollaires aux changements de la capacité vitale. Deuxièmement, nous devons nous demander si les effets du traitement par Riluzole et la VNI sont synergiques tout au long de l’étape respiratoire de la SLA. Actuellement, nous traitons avec Riluzole les patients avant qu’ils ne soient sous VNI et on ne sait pas si l’effet du Riluzole peut-être être amélioré grâce à une utilisation spécifique à chaque stade. En accord avec ce qui a été rapporté par Fang et ses collègues, Vittacca et ses collègues ont identifié un avantage potentiel accru d’introduction précoce de la VNI chez les patients SLA.

Avons-nous besoin d’établir plus précisément le lien entre la pharmacocinétique Riluzole et le stade nouvellement identifié de compromis respiratoire à laquelle le traitement par Riluzole est le plus efficace pour prolonger la vie ? Peut-être pourrions-nous également examiner spécifiquement les réponses des traitements respiratoires à l’administration du Riluzole, pour mieux comprendre le mécanisme d’action du Riluzole à ce stade de la SLA. L’effet du Riluzole sur le dysfonctionnement respiratoire en cas de lésion de la moelle épinière, par exemple, pourrait nous inspirer avantageusement. Nous n’avons aucun a priori.

Stade de survie prolongée chez la SLA – réponse de l’auteur

Le Dr Benjamin Rix Brooks et ses collègues évoquent deux études qui suggèrent que le traitement par Riluzole est plus efficace chez les patients SLA souffrant d’insuffisance respiratoire. L’efficacité a été observée chez les patients avec une diminution de la capacité vitale, ou chez les patients sous ventilation non invasive (VNI) avec des pressions inspiratoires maximales réduites, conformément à notre observation de l’efficacité du Riluzole sur des patients SLA au stade 4. Nous soutenons entièrement leur proposition visant à explorer la relation entre l’insuffisance neuromusculaire respiratoire et le traitement prolongé par Riluzole.

Nos travaux antérieurs ont démontré que la carence alimentaire (définie comme ‘difficulté à avaler’), entraînant une perte de poids prémorbide de 5 à 10 %, coïncide souvent avec une insuffisance respiratoire cliniquement significative. Il serait donc important d’établir si les effets métaboliques bénéfiques ciblent la perte de poids ou la fonction respiratoire ou les deux, compte tenu du la coïncidence de ceux-ci. Les résultats de l’essai de MIROCALS (NCT03039673) sur l’effet du Riluzole sur la fonction respiratoire, le poids, les biomarqueurs sanguins et les biomarqueurs pour le liquide céphalorachidien seront importants à cet égard.

Ammar Al-Chalabi a fourni des rapports de consultance pour Mitsubishi-Tanabe Pharma, Chronos Therapeutics, Orion Pharma et Cytokinetics. Il a été enquêteur en chef du test d’Orion Pharma (NCT02487407) et de Cytokinetics (NCT02496767). PNL rapporte les subventions et les droits personnels de Rhône Poulenc-Sanofi. Tous les autres auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêt.

 

Traduction : Fabien

Source : The Lancet Neurology

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