Le stress répété induirait une résistance à long terme aux traumatismes cérébraux suite à un AVC

16-08-2011

Michael C. Purdy

Selon des chercheurs à l'Ecole de Médecine de l'Université de Washington à Saint Louis, la réponse protectrice innée qui rend le cerveau résistant aux séquelles post AVC pourrait être prolongée pendant quelques mois de plus que précédemment répertorié.

Ce phénomène protecteur inductible, appelé tolérance, ne perdure en général  que quelques jours. Les scientifiques de l’université de Washington sont maintenant parvenus à induire une tolérance d’une durée d’au moins deux mois chez des souris adultes. D’après les chercheurs, les résultats obtenus indiqueraient que cette nouvelle forme de tolérance, qu’ils expérimentaient pour son potentiel à réduire les traumatismes cérébraux post AVC, pourrait en fait s’appliquer à de nombreuses affections neurodégénératives comme la sclérose en plaques, la maladie d’Alzheimer et la sclérose latérale amyotrophique.

La solution pour enclencher cette tolérance dans le cerveau est de stresser positivement le tissu sans l’endommager, un procédé appelé pré-conditionnement. Les scientifiques de l’université de Washington ont prolongé la tolérance de deux mois en répétant le stimulus de pré-conditionnement, dans le cas présent, une exposition en atmosphère à faible teneur en oxygène- tous les deux jours pendant deux semaines avant un AVC. Les résultats ont étés publiés en ligne le 17 mars 2011 dans Annals of Neurology.

“Pour la plupart d’entre nous, le stress a une connotation négative, mais un bon stress ou des conditions de stress peuvent en fait renforcer les réponses bénéfiques dans les cellules et les tissus sans causer aucun dommage.” explique Jeffrey M. Gidday, maître de conférences en biologie et physiologie cellulaire, en chirurgie neurologique ainsi qu’en ophtalmologie et en sciences visuelles. “Si nous parvenons à trouver comment ces effets positifs sont réalisés naturellement, nous serions en mesure de prétraiter les patients à risque d’AVC, et donc de réduire de manière significative les traumatismes cérébraux lorsqu’un AVC se produit. Nous serions aussi en mesure de freiner la progression des maladies neurodégénératives chroniques.”

Le philosophe Nietzche a dit “Ce qui ne tue pas rend plus fort.” Les scientifiques ont passé plus de deux décennies à se pencher sur la validité biologique de cet axiome. Le stress positif, comme par exemple l’imposition de brèves périodes d’exposition en atmosphère à faible teneur en oxygène, rend les cellules cérébrales, cardiaques et les autres tissus corporels temporairement plus résistants aux séquelles. Des recherches sur le pré-conditionnement cardiaque ont mené à des études cliniques, actuellement en cours, en vue d’évaluer l’efficacité de la tolérance pour réduire les séquelles suite aux AVC.

Lorsque les chercheurs induisent des AVC sur des souris chez lesquelles l’on a récemment induit une tolérance par le cerveau, les séquelles suite à l’AVC en sont grandement diminuées.

Après un AVC, les cellules tolérantes du cerveau  sont moins susceptibles de connaître une apoptose, de mourir d’une forme d’hyperstimulation plus connue sous le nom d’excitotoxicité, ou de subir des lésions inflammatoires  ou de composés chimiques réactifs appelés radicaux libres.

Jeffrey M. Gidday présente cette tolérance enclenchée par pré-conditionnement comme le ‘côté face de la médaille’ en ce qui concerne l’apoptose- un mécanisme suicidaire intégré aux cellules qui est déclenché par les lésions portées à l’ADN et aux autres molécules.

“Au lieu d’une mort cellulaire programmée, nous avons ici une survie cellulaire programmée,” déclare-t-il. “Si l’on stresse une cellule de la façon ad hoc, cela modifiera le choix des gènes utilisés par la cellule, mettant la cellule en mode protectif puissant d’où il est plus résistant à tous types de lésions.”

Et Jeffrey M. Gidday estime que cette durée de deux mois de tolérance post AVC chez les souris, qui n’ont une espérance de vie que de deux à trois ans, pourraient signifier qu’un phénomène semblable est susceptible de se prolonger pour six mois ou plus.

Pour les traitements cliniques, il envisage un agent pharmaceutique à même de déclencher certaines des modification de l’activité du même gène avec déclenchement par pré-conditionnement répété en atmosphère à faible teneur en oxygène. Toutefois la tolérance ne se développe pas assez rapidement que pour l’envisager en tant que traitement pour un AVC sévère, ou pour d’autres traumatismes imprévisibles comme une rupture d’anévrisme, un traumatisme crânien ou encore de la moelle épinière.

Jeffrey M. Gidday et al. espèrent plutôt voir cette tolérance soutenue induite chez des patients déjà identifiés au préalable comme présentant des risques accrus d’AVC ou d’autres affections neurologiques, assurant à ces individus une protection non négligeable au cas ou le traumatisme venait à se produire.

L ‘équipe de Jeffrey M. Gidday tente actuellement d’investiguer les gènes présentant une activité modifiée dans un cerveau tolérant, y compris ceux présents dans les vaisseaux sanguins cérébraux. Et ils examinent également différentes manières d’enclencher une tolérance à long terme du point de vue pharmacologique. Aussi ont-ils lancé des projets en coopération afin de tester la propension de cette tolérance étendue à freiner la progression de la maladie chez des animaux modèles pour la sclérose en plaques et la sclérose latérale amyotrophique.

"C’est une avancée majeure dans notre façon d’appréhender la prévention de traumatismes cérébraux,” déclare Jeffrey M. Gidday. “Pendant des décennies, nous nous sommes concentrés avec peu de succès sur l’élaboration de médicaments qui bloqueraient les voies moléculaires qui selon nous contribuent aux traumatismes tissulaires. Or, des études comme celle-ci tendent à démontrer que Mère Nature pourvoit l’une des meilleures protections contre les traumatismes. Il ne nous reste donc plus qu’à les étudier pour mieux comprendre ce qu’elles sont et comment les activer en toute sécurité.”

Traduction: Estelle

Source: ALS Independence

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