Une souris double-tâche

27-09-2011

Un nouveau modèle animal pour répondre aux problèmes essentiels liés à la SLA et au Syndrome de Perry.

Une seule mutation de la dynactine pourrait causer deux maladies: La SLA et le Syndrome de Perry.

Le professeur Albert Ludolph-chercheur de Packard et ses collègues après avoir aidé à organiser  un dépistage génétique à grande échelle des patients SLA (PALS) en Europe — vérifiant l’AND de quelques  2,000 d’entre eux — ont découvert chez 18 patients une mutation inhabituelle du gène codant la dynactine (DCTN1), une protéine au rôle crucial de transport intracellulaire pour les motoneurones et autres cellules.

La dynactine n’est pas une nouveauté pour les chercheurs SLA. En effet, en 2004, le professeur Ludolph, neurologue et chercheur en neurobiologie à l’université d’Ulm en Allemagne, dirigeait l’une des premières équipes* visant à trouver le lien entre mutations du gène et risque accru d’être frappé par la maladie.

Et quelques années plus tard, un groupe de recherche de Johns Hopkins sous la direction du chercheur Phil Wong de Packard commença à réaliser des modèles murins dynactine — des souris porteuses de gènes dynactine humains normaux et de gènes présentant la mutation liée à la maladie du motoneurone humain (MMN). Les souris mutantes allaient plus mal jusqu’à imiter la condition des PALS; elles présentaient une perte caractéristique de motoneurones inférieurs et autres signes biologiques, avec les signes cliniques correspondant, confirmant que le gène mutant est potentiellement une mauvaise nouvelle.

Cela n’a donc nullement surpris le professeur Ludolph, lors du dépistage génétique, de constater des cas de  PALS confirmés présentant des mutations de la dynactine. “En fait, nous nous y attendions,” a-t-il dit récemment lors d’une réunion de chercheurs de Packard. “Mais ce que nous n’avions pas prévu,” ajoute-t-il, “c’était de rencontrer autant de symptômes atypiques.” Tant lui que le professeur Wong — ils ont conclu un partenariat de recherche à Packard — ont été assez déconcertés par le nombre de patients présentant des mouvements inhabituellement lents, de la raideur et des tremblements, de l’apathie ainsi que d’autres symptômes psychiatriques en plus de leurs problèmes liés à la SLA.

Deux maladies, Un même gène
Outre la SLA, un lien avait déjà été établi entre les mutations de dynactine et le syndrome de Perry, une affection cérébrale évolutive qui est heureusement rare. Il semblerait que ce soit la maladie liée qui a émergé lors du dépistage génétique. “Voici donc le cas où,” selon le professeur Wong, “vous avez un gène qui peut entraîner ce qui semble être deux maladies distinctes.” Toutes deux sont d’ordre neurologique et dégénératif, mais elles se développent apparemment dans différentes parties du corps. Toutefois, comme les professeurs Ludolph et Wong l’ont découvert, il peut y avoir des patients présentant la SLA et une maladie qui ressemble très certainement au syndrome de Perry.

Cet effet un gène-plusieurs-conditions a un précédent dans la sphère de la SLA, et est formellement appelé pléiotropie. Les chercheurs savent maintenant que le gène codant pour la protéine toxique TDP-43 est impliqué dans la SLA, ainsi que dans un type spécifique de démence assez courant appelé-DLFT-TDP **.Un certain nombre, heureusement restreint, de patients peut présenter les deux maladies en même temps.

“Cette ‘double tâche’ pose bien sûr question,” ajoute le professeur Wong. “Par exemple: S’agit-il vraiment d’un seul large spectre de maladies du système nerveux central— où il y aurait une neurodégénérescence généralisée sous-jacente mais confinée à des zones spécifiques du cerveau ou de la moelle épinière, selon les gènes facteurs de risques additionnels qui entrent en jeu?"

“Savoir comment un gène peut donner naissance à différents phénotypes (caractéristiques) nous permettrait-il de comprendre pourquoi la SLA peut varier d’un patient à l’autre? Pourquoi il y a des différences quant à la zone où elle se déclare et la vitesse à laquelle la maladie progresse"

“Et il nous reste à résoudre des questions plus pointues: Comment la dynactine mutante mène-t-elle précisément à la SLA? Au syndrome de Perry?”

Deux modèles en un
La démarche sensée à suivre pour trouver ces réponses est alors de créer en premier lieu des modèles animaux, et c’est ce qui a été fait.

Il y avait la version plus ancienne de modèle dynactine de SLA réalisée au labo du professeur Wong par Fiona Laird. Et maintenant, les chercheurs des laboratoires respectifs du professeur Wong et du professeur Ludolph ont développé une souris modèle tant de la SLA que de l’affection semblable au syndrome de Perry. Ce modèle est basé sur l’une des nouvelles mutations dans la dynactine humaine  mises à jour par le dépistage génétique, un choix pour lequel les chercheurs ont opté après avoir constaté son mode de fonctionnement lors d’“essais” sur des motoneurones et des cellules génériques de reins.

Le modèle animal présente une perte neuronale et d’autres caractéristiques d’une maladie du motoneurone (MMN). Mais une vidéo réalisée par Kerstin Braunstein au labo du professeur Wong montre clairement que les symptômes “extrapyramidaux” du syndrome de Perry — la lenteur, la raideur et autres symptômes semblables se retrouvent dans la démarche de la souris.

D’autres labos créent des modèles murins qui modélisent uniquement le syndrome de Perry, le professeur Wong ajoute que “Comparer tous ces modèles nous permettra de comprendre comment un gène peut déclencher différentes maladies.”

– Marjorie Centofanti

*Une équipe dirigée par le conseiller scientifique de Packard, Kurt Fischbeck,  a établi pour la première fois le lien SLA-dynactine.

**DLFT pour dégénérescence lobaire fronto-temporale.

Traduction: Estelle

Source: Packard Center

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