Le rôle des ions métalliques dans la sclérose latérale amyotrophique

14-06-2011

compte-rendu : Megan Bourassa et Lisa Miller
PhysOrg

La sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie neurodégénérative progressive affectant les motoneurones dans la moelle épinière entraînant faiblesse musculaire, paralysie et décès dans les deux à cinq ans suivant le diagnostic. Avec un risque de développer la maladie de 1 sur 2,000, la SLA est la maladie du motoneurone la plus répandue.

Dans près de 90 pour cent des cas, la SLA est de nature sporadique, c’est-à-dire sans cause connue. Toutefois, pour les 10 pour cent restants, il s’agit d’une SLA héréditaire. Et parmi ces cas de SLA d’origine génétique, 20 pour cent sont liés aux mutations d’une métalloprotéine (protéine qui comporte un cofacteur métallique) – la superoxyde dismutase (SOD1), un enzyme antioxydant important qui nécessite du zinc pour sa stabilité structurelle et du cuivre pour sa fonction purifiante. Notons que plus de145 mutations différentes de SOD1 ont été identifiées chez des patients atteints de SLA (les PALS).

Dans une étude récente publiée dans le Journal of Biological Chemistry, notre équipe du Laboratoire national de Brookhaven (BNL :Brookhaven National Laboratory) et nos collègues de l’UCLA (Université de Californie à Los Angeles), de l’Université de Floride, et de l’Université d’État de New York à Stony Brook se sont servi de modèles murins de la SLA afin de comprendre le rôle joué par les ions métalliques et les mutations de SOD1 dans le développement de la maladie. Ces souris ont été génétiquement prédisposées pour développer des symptômes semblables à la SLA en surproduisant des variantes humaines de SOD1 muté. Tout comme les patients humains, elles ont développé des agrégats de SOD1 dans la moelle épinière et subi une paralysie progressive. Afin d’étudier le rôle des ions métalliques dans ces agrégats et la maladie, nous avons analysé le cuivre et le zinc dans les tissus de la moelle épinière sur deux points. D’abord, nous avons vérifié que les molécules de protéine SOD1 soient entièrement "métallées," ce qui rend la protéine opérationnelle. Ensuite, nous avons vérifié la répartition générale en cuivre et en zinc dans la moelle épinière.

Dans une première phase de cette étude, SOD1 a été délicatement extrait de la moelle épinière et séparé en fractions solubles(non-agrégées) et insolubles (agrégées), qui ont été analysées quant à leur contenu en métal. Les résultats ont démontré que les agrégats ne contenaient pas les ions métalliques nécessaires aux protéines pour être fonctionnelles. Par contre, SOD1 soluble contenait la quantité escomptée en cuivre et en zinc nécessaire au fonctionnement de la protéine. Et comme SOD1 est particulièrement stable une fois entièrement ‘métallé’, ces découvertes viennent étayer l’ hypothèse selon laquelle les agrégats du SOD1 muté sont dérivés d’une protéine immature avant qu’elle n’ait eu l’occasion d’acquérir les ions de cuivre et de zinc nécessaires.

Dans une seconde phase, le synchrotron NSLS beamline X27A (National Synchrotron Light Source: synchrotron accélérateur de particules) a été utilisé pour mettre en image la répartition en cuivre et en zinc dans des échantillons de moelle épinière. Pour les mutations où SOD1 était capable de lier les ions de cuivre, les résultats ont démontré que le cuivre était redistribué dans les régions à forte densité de SOD1, laissant d’autres régions tissulaires déficientes en cuivre. La répartition en zinc suivait un autre mode, où l’on retrouvait une forte concentration de zinc dans la ‘’substance blanche’’ de la moelle épinière pour toutes les mutations, et ce quelle que soit la capacité de cette mutation à lier les ions métalliques. Et puisque la substance blanche de la moelle épinière est la région où la transmission nerveuse a lieu, une haute densité en zinc pourrait indiquer le court-circuitage ou la mort des neurones.

Le résultat de ces études nous apporte de nouvelles informations sur la progression de la SLA. Par exemple, il semblerait que pour la SLA, les agrégats surviennent de SOD1 nouvellement formé, antérieurs à la métallation (type de réaction permettant d'insérer un ion métallique dans un composé). Sitôt le cuivre et le zinc liés au SOD1, celui-ci devient particulièrement stable et n’est dès lors plus susceptible de former des agrégats. D’où, un traitement potentiel de la SLA pourrait inclure des méthodes de métallation du SOD1 antérieures à la formation d’agrégats. De plus, la maladie entraîne la redistribution d’ions métalliques dans la moelle épinière, compromettant ainsi davantage le métabolisme tissulaire. Il est intéressant de noter que la modification du contenu en zinc pourrait être un marquer diagnostique de l’évolution de la maladie, et des études ultérieures à un stade moins avancé de la maladie devraient investiguer cette éventualité.

Traduction: Estelle

Source: The Independence

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