Des protéines qui dérapent
20-03-2012
Des chercheurs développent un algorithme permettant de prévoir quand et comment des protéines se replieront de façon erronée.
Newswise – San Diego – Plusieurs affectations neurodégénératives, dont la maladie d’Alzheimer et la SLA, sont constatées au moment où les protéines du corps humain se replient de façon erronée et entrainent d’autres protéines saines à faire de même. Ce phénomène provoque des agrégats importants qui détériorent localement le bon fonctionnement du système nerveux. Steven Plotkin, biophysicien à l’Université de la Colombie Britannique à Vancouver effectue des recherches sur le repliement erroné des protéines. Pendant son exposé, il utilise une comparaison issue de l’univers de Star Trek. Plotkin évoque les Borgs de Star Trek, des êtres assimilés dans la société, qui n’agissent pas de façon individuelle mais collective et détériorent cette société.
Le repliement d’une protéine est le processus par lequel une protéine se replie dans sa structure tridimensionnelle fonctionnelle ou se met en conformité. C’est le procédé physique par lequel un polypeptide prend sa forme tridimensionnelle fonctionnelle caractéristique, à partir d’un enroulement aléatoire. Un polypeptide est un peptide long, continu et linéaire. Le peptide est lui-même composé d’acides aminés. Une protéine consiste en un ou plusieurs polypeptides agencés de façon biologiquement fonctionnelle. Chaque protéine existe d’abord sous la forme d’un polypeptide (ou d’une chaine de polypeptides) enroulé de façon aléatoire avant d’être déplié à partir d’une séquence mRNA en une chaine linéaire d’acides aminés. Cette chaine doit encore prendre sa forme tridimensionnelle fonctionnelle. Les acides aminés interagissent entre eux pour prendre une forme tridimensionnelle spécifique, c’est la protéine repliée, aussi appelée à l’état natif. La structure tridimensionnelle adoptée est déterminée elle-même par la séquence des acides aminés.
La structure tridimensionnelle conforme est essentielle pour le bon fonctionnement, même si certaines parties de la protéine fonctionnelle peuvent rester dépliées. Une erreur dans le repliement vers l’état natif peut rendre les protéines inactives, celles-ci sont généralement toxiques. Il est admis que plusieurs maladies -neurodégéneratives ou autres- sont causées par l’amoncellement d’amyloïdes dû au repliement erroné de protéines. Diverses allergies sont dûes au repliement de protéines parce que le système immunitaire ne produit pas d’anticorps pour certaines structures de protéines.
L’équipe de Plotkin a élaboré un algorithme permettant de prédire quelles parties d’une protéine seraient susceptibles de se replier de façon erronée. Cet algorithme montre aussi comment des mutations de ces protéines ou des changements de l’environnement cellulaire peuvent influencer la stabilité de ces parties plus sensibles. Ces prédictions permettent aux scientifiques de mieux comprendre la dynamique des protéines et de contribuer ainsi à l’élaboration de thérapies efficaces dans le traitement de maladies neurodégénératives. L’équipe a présenté les résultats de ses recherches lors de la 26° Assemblée Annuelle de la Biophysical Society (BPS), qui a eu lieu du 25 au 29 Février à San Diego.
L’algorithme de l’équipe de Plotkin utilise les équations fondamentales de la thermodynamique pour calculer la probabilité de certaines zones d’une protéine à être exposées lors du repliement erroné de la protéine. Ces zones exposées sont spécifiques aux protéines déployées erronément et peuvent ainsi être utilisées comme cibles par les chercheurs pour les diagnostics ou actes thérapeutiques. Ces algorithmes peuvent être adaptés à diverses protéines et peuvent prédire plusieurs cibles pour chacune. L’équipe a étudié, lors de ses recherches, des protéines causant des maladies neurodégénératives ou certains cancers dûs à des repliements erronés.
L’équipe de chercheurs a effectué, plus récemment, des simulations sur ordinateur pour manipuler des protéines dans un environnement virtuel. Ils ont ainsi pu tester la prédisposition d’une protéine à se déplier de façon erronée et à se reproduire. L’algorithme a ainsi été utile à la prédiction du développement de la forme familiale de la SLA.
Plotkin déclare: « Le fait que nous parvenons à prédire la durée de vie d’une personne diagnostiquée SLA de forme familiale à partir de simulations de caractéristiques mécaniques d’une protéine est un progrès qui favorise d’autres développements. Nous espérons contribuer ainsi au développement de thérapies efficaces contre la maladie. »
La présentation « Template-directed protein misfolding in silico and in the cell, » a eu lieu le Jeudi 28 Février dans le Centre de Séminaires de San Diego. Elle est disponible: http://tinyurl.com/6pg3vbw
Traduction : Fabien Motmans
Source : Newswise