Test-achat sur le traitement SLA controversé en Chine

19-02-2005

La SLA signifie la sclérose latérale amyotrophique. C’est une maladie des neurones qui servent à commander les muscles. La SLA entraîne un fonctionnement musculaire insuffisant, vu que les neurones moteurs dans la moelle épinière et dans la partie basse du cerveau- à savoir le tronc cérébral- meurent. Il s’ensuit que les signaux provenant du cerveau n’atteignent plus les muscles. La maladie surgit normalement entre l’âge de 40 à 60 ans. L’affection peut commencer dans n’importe quel groupe musculaire. Progressivement la maladie affectera de plus en plus de muscles. L’élimination des muscles respiratoires constitue souvent la cause de décès. La durée de survivance et le déroulement pathologique diffèrent fortement d’un patient à l’autre. La plupart du temps la SLA est fatal après 3 à 5 ans. Toutefois, chez certains patients l’affection avance plus lentement.

De nos jours il n’existe pas de traitement efficace pour la maladie. Les derniers mois, bon nombre de patients décident de subir un traitement en Chine. Surtout des Américains, mais actuellement également des Belges. En Chine, le Dr. Huang Hongyun a injecté certains cellules dans le cerveau. Le traitement est cher, mais les patients prétendent se sentir mieux après. Actuellement, de plus en plus de patients SLA veulent faire le voyage. Toutefois, le traitement appliqué en Chine fait surgir bon nombre de questions.

A tort ou non, cette situation fait penser e.a. à l’affaire Di Bella. Luigi Di Bella (1912-2003) était un docent en physiologie en retraite qui suscitait, fin des années ’90, de la commotion dans des hôpitaux de cancer italiens, à la télévision, dans des tribunaux et dans les rues de Rome. Di Bella introduisait une méthode soi- disant miraculeuse contre le cancer (un coctail de somatostatine, bromocriptine, melatonine et de vitamines) et bon nombre de patients ont voulu subir cette thérapie, coûte que coûte. Les patients de Di Bella devaient payer environ 6000 euro par mois. Pourtant il n’y avait pas de preuves convaincantes de l’efficacité du traitement, uniquement des témoignages de patients. Les adhérents de Di Bella étaient remboursés par le gouvernement en ce qui concerne les frais pour les médicaments. L’argument de base judiciaire principal était la ‘liberté de choix’ des patients. Les verdicts judiciaires entraînaient que l’on examinait le traitement scientifique de façon précipitée. La conclusion était que le traitement ne fonctionnait pas. De nos jours, on n’entend que très peu parler de la cure de Di Bella. Peut-être le traitement SLA chinois est un cas similaire ?

Il existe beaucoup de sortes de thérapie cellulaire. Dans le centre chinois on utilise des cellules de support provenant du nerf d’odorat (olfactory ensheating cells – OEC). On examine ces cellules de façon intensive dans le monde scientifique, mais on n’est que dans le stade des essais de laboratoire sur des toiles et sur des animaux d’expérience. On ne sait pas du tout si, en pratique, ces cellules peuvent réellement apporter quelque chose au traitement de la SLA. Le docteur Huang Hongyun cultive des OEC du nerf d’odorat de foetus avortés pendant le deuxième trimestre de la grossesse (mois 4 à 6). Remarquons que l’usage de cellules de foetus âgés entre 4 et 6 mois, est interdit dans beaucoup de pays. Apparemment ce n’est pas le cas en Chine. Huang Hongyun traite des personnes paralysées à cause de lésions à la moelle épinière et aussi des patients SLA. Actuellement des centaines de personnes désespérées se trouvent sur une liste d’attente de la clinique à Pekin. Chez les personnes avec une lésion à la moelle épinière, il injectait 1 million de cellules dans la moelle épinière. Chez les patients SLA, il injectait pendant l’opération environ 2 millions de ces cellules dans le cerveau.

Hélas, il n’existe pas de preuve qu’une telle transplantation cellulaire a un effet réel. La source principale d’informations positives sont les témoignages individuels des patients, qui prétendent généralement que leur condition a améliorée depuis l’opération. Toutefois, quelques patients sont décédés après l’opération. Vu que la durée de survivance et le déroulement pathologique diffèrent considérablement d’un patient à l’autre, il est impossible de tirer des conclusions des témoignages individuels. Peut-être que les patients qui pensent entrevoir une amélioration, se seraient également sentis mieux sans traitement. En plus, il se peut que les patients qui pensent se sentir mieux, auraient ‘éprouvé’ la même chose s’ils n’étaient PAS traités, sans le savoir, mais s’ils avaient subi une opération fausse (anesthésier, ouvrir et refermer, sans injecter). Bref, il peut s’agir d’un simple effet placebo.

Est-ce que le traitement entraîne une amélioration ? Peut-être, mais il se peut aussi qu’il ne change rien, ou que le traitement a plutôt des effets négatifs. Personne ne le sait, à cause d’un manque de recherche scientifique sérieuse. Quant au médicament Rilutek par exemple, qui aurait un effet très légère sur la survivance de patients SLA, on a fait des études où l’on administrait à certains patients le médicament et à d’autres un placebo. De cette façon on pourrait comparer le groupe traité avec un groupe de contrôle, pour observer l’effet du traitement. Il est important d’établir d’avance des critères bien déterminés. En Chine, cela ne se produit pas. On ne fait pas d’évaluation profonde du fonctionnement des patients avant et après l’opération, il n’y a pas de groupe de contrôle, ni un contrôle systématique et à long terme des patients. Si l’on est si sûr en Chine de l’efficacité de la thérapie cellulaire utilisée, pourquoi ne fait-on pas de recherche scientifique sérieuse, qui ferait taire les sceptici ?

Cette forme de thérapie cellulaire pour la SLA et pour des lésions à la moelle épinière constitue une expérience exécutée sur des êtres humains. L’exécution d’expériences sur des êtres humains, hors du cadre des recherches scientifiques sérieuses, est immorale, puisque c’est en contradiction avec la déclaration de Helsinki, qui pose que l’on ne peut exécuter des expériences sur des êtres humains que sous des conditions bien déterminées. L’opération en Chine ne correspond pas à ces conditions. Le fait que les patients doivent payer pour subir l’expérience, signale qu’il y a quelque chose qui cloche. Normalement la participation à des recherches cliniques est gratuit pour le patient. Il est étonnant que le gouvernement chinois permette de telles pratiques. La liste d’attente devient de plus en plus longue : il s’agit de personnes désespérées qui sont prêtes à payer plus de 25000 euro pour se laisser traiter.

Nous insistons auprès le gouvernement belge à parler aux autorités chinois de ce sujet, afin de créer plus de clarté.

L’étude sur l’utilité de la thérapie cellulaire et l’utilisation de OEC dans des maladies telles que la SLA doit continuer. Les patients et les médecins espèrent que ce sera une option de traitement utile. Toutefois, l’utilité de la thérapie cellulaire chez l’homme n’est pas encore prouvée. Des études minutieusement contrôlées s’avèrent donc utiles. Vu la situation dans laquelle nous nous trouvons, l’Union des consommateurs Test- Achat ne conseille pas aux patients SLA (et aux personnes avec une lésion à la moelle épinière) de subir une transplantation OEC.

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