Continuer à avancer: c’est mon histoire

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Courir contre la maladie de la SLA

Marco Velosa

Marco Velosa souffre de la maladie incurable appelée SLA. Mais cela ne l’a pas empêché de participer en septembre à la course Ekiden à Bruxelles, avec d’autres collègues, pour sensibiliser le public à cette maladie. Voici son témoignage émouvant.

La sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie neurodégénérative incurable dans laquelle les motoneurones du cerveau et du tronc cérébral meurent. En raison de la perte de signaux de mouvement des muscles, il en résulte une réduction de la force musculaire et éventuellement une paralysie. Le patient est pris au piège dans son propre corps. Les membres ne sont pas les seuls touchés par la maladie. De même, les muscles respiratoires, les muscles des cordes vocales, les muscles pour mordre ou pour avaler ne sont pas épargnés, ce qui provoque la mort du patient en moyenne 33 mois après le diagnostic. Il n’existe actuellement aucun médicament qui puisse guérir ou ralentir.

J’étais en bonne santé, je n’ai jamais pris de congé de maladie de ma vie - juste une fois pour des calculs rénaux - et soudainement, en mai 2017, j’ai commencé à avoir de nombreux problèmes: une dent que j’ai finalement perdue, une sinusite grave, de l’asthme, ma voix devenait nasale, une opération pour une hernie… et en décembre je suis allé voir un neurologue à cause du changement de ma voix.

Je m’en souviens comme si c’était hier. Le 4 décembre 2017, on m’a diagnostiqué la SLA.

Au cours de la consultation, les questions sont devenues étranges: si je me sentais fatigué, si j’avais du mal à ouvrir les portes, à boutonner ma chemise, à faire les lacets? Toutes ces choses étaient en fait une réalité pour moi. Dans l’après-midi, je suis revenu faire d’autres examens avec un autre médecin. À la fin, les deux spécialistes se sont échangés un regard et m’ont demandé de revenir trois jours après avec ma femme. Je ne pouvais pas attendre trois jours et finalement le diagnostic de la SLA est tombé. Je ne l’ai pas très bien compris et j’ai demandé s’il s’agissait de la maladie de Stephen Hawking. Ils ont dit oui.

Je me souviens de mon retour à la maison: me voilà avec la maladie de Stephen Hawking pour laquelle il n’y a «pas de remède, et qu’il n’y a qu’une durée de vie de deux à cinq ans». Quand je suis arrivé à la maison, je me suis effondré dans les bras de ma femme et j’ai pleuré comme un bébé. Après cela, j’ai traversé les deux mois les plus sombres de ma vie, un autre médecin avait confirmé le diagnostic en faisant plus d’examens, je mettais ma famille au courant et je le disais à mes amis proches, je cherchais quoi faire, j’essayais de comprendre la maladie au mieux possible, et j’essayais de trouver de l’espoir partout.

Fin janvier, je suis retourné chez le médecin et j’ai entendu le même discours intitulé “Pas de remède, durée de vie de deux à cinq ans!” Mais j’ai répondu: “Stephen Hawking. L’astrophysicien le plus brillant du monde a vécu cinquante ans avec cette maladie” ! Le neurologue m’a simplement répondu que personne ne savait pourquoi. Cela à continuer à trotter dans ma tête. Les statistiques sont impitoyables, car un tiers des personnes décèdent dans l’année et plus de la moitié dans les deux ans suivant le diagnostic, mais nous avons aussi Stephen Hawking qui a continué à avancer. Cela est devenu mon mantra: “Continuer à avancer.”

Après avoir consulté ma femme et mon fils, j’ai décidé de continuer à avancer. Ma vie est plus lente maintenant, mais cela m’a permis de découvrir beaucoup plus de choses qui auparavant étaient passées inaperçues. Parfois, je sens que c’est une bénédiction. Je regrette seulement d’être obligé de ralentir et de ne pas pouvoir le faire par mon propre choix. J’ai décidé de retourner au travail et de continuer à avancer. J’ai expliqué ma situation à ma hiérarchie, ainsi que les départements social, médical et de l’égalité des chances, et ils ont été formidables. Ils m’ont compris et m’ont soutenu dans ma décision. Au début, j’ai essayé à temps plein (contre l’avis de mon médecin), mais maintenant je travaille à mi-temps. La SLA est la maladie des pertes. Je perds lentement ma voix (bien que je fasse de l’orthophonie deux fois par semaine), il me faut quatre fois plus de temps pour manger (finalement, je ne pourrai plus le faire), je dois me rappeler d’avaler ma salive, sinon je vais commencer baver. Je ne peux plus m’habiller sans assistance, je ne peux pas courir, j’ai besoin de réfléchir à chaque pas que je fais, sinon je tombe, et chaque mouvement exige une énorme énergie.

Mais au lieu de penser aux pertes, je pense à ce que j’ai encore et je m’en réjouis. J’ai une famille qui m’aime, mes amis, je peux toujours travailler et avoir le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand que moi, je peux toujours bouger et à l’avenir, j’utiliserai la technologie pour continuer à bouger.

La vie est plus lente maintenant, mais cela m’a permis de découvrir beaucoup plus de choses qui étaient passées inaperçues. Parfois, je sens que c’est une bénédiction. Je regrette seulement d’être obligé de ralentir et de ne pas le faire par mon propre choix.

Courir l’Ekiden

L’événement Ekiden est un parfait exemple de win-win face à la SLA qui est une maladie de pertes.

Tout a commencé pendant le déjeuner avec mon ami Sakis (après avoir fini, bien sûr, car je ne peux ni parler ni manger en même temps), avec une invitation à participer à l’événement Ekiden. Je lui ai répondu avec un sourire, que la course à pied est quelque chose que je ne peux pas faire, mais pourquoi pas en fauteuil roulant. Nous avons immédiatement pensé que nous pourrions l’utiliser pour sensibiliser à la SLA.

Après cela, les choses ont pris une vie propre, car en seulement trois semaines, nous avons obtenu le soutien des organisateurs d’Ekiden, la Ligue SLA, et - plus important encore - de tous les collègues qui ont immédiatement rejoint la cause. Comment une simple conversation au déjeuner est devenue une initiative merveilleuse, avec toutes les personnes travaillant pour une cause commune.

L’événement lui-même s’est avéré encore meilleur, les deux équipes s’étant unies pour sensibiliser les gens à la SLA. Je pourrais dire beaucoup de choses à propos de cet événement qui pour moi était accablant, mais si je devais mettre en évidence quelque chose, ce serait la liste que nous avons écoutée avec Sakis et qui nous a donné la force de parcourir les cinq kilomètres.

L’événement Ekiden était un exemple parfait de la façon dont nous pouvons et devons continuer à avancer. “Nous avons tendance à rechercher des miracles là où ils n’existent pas et à ne pas remarquer ceux qui se déroulent à côté de nous. Marco est un tel miracle: un phare de positivité, de force, de dignité et de gentillesse; la lumière qui vainc les ténèbres. Soutenons ceux qui le soutiennent! “, a déclaré Sakis Papakonstantinou.

Marco Velosa

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