Le sirop d’érable protège les neurones et forme la relève scientifique

14-04-2016

Deux jeunes étudiantes prouvent que le sirop d’érable empêche le développement de la sclérose latérale amyotrophique chez le ver C. elegans

Montréal (Québec) – Catherine Aaron et Gabrielle Beaudry avaient 17 ans lorsqu’elles ont cogné à la porte du laboratoire d’Alex Parker, chercheur en neurosciences au Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CRCHUM). Étudiantes au Collège Jean-de-Brébeuf à Montréal, elles cherchaient un mentor pour un projet de recherche parascolaire. Deux ans et demi plus tard, le résultat de cette aventure scientifique est publié aujourd’hui dans la revue Journal of Agricultural and Food Chemistry.

« On voulait tester l’effet d’un produit naturel sur une maladie neurodégénérative comme la maladie d’Alzheimer. Le professeur Parker avait déjà découvert que le sucre empêche l’apparition de la sclérose latérale amyotrophique chez un modèle animal de cette maladie, le ver C. elegans. C’est comme ça qu’on a eu l’idée du sirop d’érable, un sucre naturel produit au Québec », raconte Gabrielle Beaudry.

Encadrées par l’étudiante au doctorat Martine Therrien et par Alex Parker, Catherine et Gabrielle ont ajouté du sirop d’érable à la diète de ces petits vers nématodes d’à peine un millimètre de long. « Il suffisait de leur fournir un supplément de sirop d’érable à différentes concentration et de comparer avec un groupe témoin qui avait une diète normale, explique Catherine Aaron. Après douze jours, on comptait au microscope les vers qui bougeaient et ceux qui étaient paralysés. Les vers qui avaient consommé la plus forte dose de sirop d’érable avaient beaucoup moins tendance à paralyser. »

Les vers C. elegans d’Alex Parker sont modifiés génétiquement pour exprimer une protéine impliquée dans la sclérose latérale amyotrophique dans le motoneurone, la TDP-43. « À l’âge adulte, autour de 12 jours, les motoneurones se cassent. Normalement à deux semaines de vie, 50 % des vers sont complètement paralysés.  Mais chez ceux qui ont reçu une diète enrichie à 4 % de sirop d’érable, seulement 17 % paralysent. On peut donc conclure que le sirop d’érable protège les neurones et empêche le développement de la sclérose latérale amyotrophique chez le vers C. elegans », fait valoir Alex Parker, chercheur au CRCHUM et professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

Comment expliquer cet effet spectaculaire? « Le sucre est bon pour le système nerveux. Les neurones malades ont besoin de plus d’énergie pour combattre les protéines toxiques. Mais le sirop d’érable est aussi riche en polyphénols, de puissants antioxydants qu’on retrouve dans certains aliments. Nous avons isolé les phénols contenus dans le sirop d’érable et nous avons montré que deux polyphénols en particulier, l’acide gallique et le cathécol, ont un effet neuroprotecteur. Dans le sirop d’érable pur, ces polyphénols se retrouvent en faible concentration. C’est donc probablement un effet combiné du sucre et des polyphénols qui empêche l’apparition de la maladie chez les vers », explique Martine Therrien, doctorante au CRCHUM.

N’allez pas vous gaver de sirop d’érable en pensant vous protéger des maladies du système nerveux ! « L’espérance de vie des vers C. elegans n’est que de trois semaines. Ils sont épargnés par les effets toxiques à long terme du sucre. Les humains qui prendraient des quantités comparables de sirop d’érable risqueraient de développer des maladies chroniques comme le diabète de type 2 ou l’obésité », nuance Alex Parker. 

La sclérose latérale amyotrophique est une maladie neuromusculaire rare qui entraîne la paralysie et la mort quelques années après les premiers symptômes. Il n’existe à l’heure actuelle aucun médicament pour guérir les personnes atteintes. Cette dernière étude sur le sirop d’érable et les vers C. elegans a été menée dans un but pédagogique. D’autres recherches d’Alex Parker avec ces vers C. elegans ont permis de découvrir des molécules prometteuses qui seront testées chez des patients dans quelques années.

Catherine Aaron et Gabrielle Beaudry ont remporté le « prix du public » du volet québécois du concours Sanofi Biogenius Canada avec ce projet en avril 2014. Catherine est maintenant en première année de médecine à l’Université de Montréal et Gabrielle étudie en psychologie à l’Université de Sherbrooke.

 

Source : The University of Montreal Hospital Research Centre (CRCHUM)

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